Une addition juste de chiffre faux. C’est ainsi que l’on peut qualifier certaines parties du plan climat lausannois, fondé sur des statistiques à faire pâlir toutes les bananes bleues.
Retour en arrière : nous sommes en 2021, la campagne des élections communales fait rage et, comme une fleur, le plan climat de la ville est publié peu avant le scrutin. Forte de ses calculs, la Municipalité de gauche s’engage dans la bataille : zéro véhicule thermique à Lausanne en 2030, zéro émission directe dans le domaine de la mobilité à la même date. Avec de telles ambitions, comment ne pas motiver son électorat, en pleine vague verte ?
A la lecture de ce plan climat, plusieurs chiffres me paraissent douteux. En ce qui concerne la mobilité en particulier, je dépose alors une interpellation pour savoir comment la Ville obtient ses résultats prometteurs.
Un rôle essentiel laissé aux vélos
L’objectif zéro émission en matière de mobilité est un élément essentiel du plan climat, puisque ce domaine représente un quart des gaz à effet de serre rejetés dans l’atmosphère à Lausanne. Raison pour laquelle les objectifs sont clairs : la Municipalité veut notamment faire passer la part modale du vélo de 2% en 2015 à 15% en 2030.
Egrainés au fil de la campagne, les chiffres sont encourageants selon la Municipalité. Son observatoire de la mobilité 2021 l’affirme : 84% d’augmentation de l’utilisation du vélo depuis 2017, ce qui représenterait « 6’720 passages de cyclistes par jour en 2020 en cinq points de la ville » soit « 6% de part modale » par endroits.
Il aura fallu attendre la réponse à mon interpellation pour que l’entourloupe se confirme : ces chiffres, s’ils sont intéressants, correspondent à une mesure… faite par beau temps un jour d’été, en semaine, durant les heures de pointe.
Des statistiques pas si représentatives…
Vous m’avez bien lu. La statistique de part modale du vélo est mesurée par beau temps uniquement, durant l’été. Il s’agit d’une valeur devant normalement être utilisé uniquement pour « comparer les chiffres entre les différentes années », comme l’admet la Municipalité dans sa réponse. Prétendre qu’il s’agit de la part modale générale ou du nombre de passage « par jour durant l’année X » relève au mieux de la maladresse, au pire de la manipulation.
Autre subtilité : les chiffres présentés en 2021 puis largement communiqués avaient été mesurés non-seulement durant une belle journée d’été, mais cela en pleine pandémie. Il est clair qu’un certain report de mobilité avait eu lieu durant cette période, notamment par les citoyens désireux d’éviter les transports en commun.
Si l’on compare les chiffres largement diffusés de 2021 et la dernière publication portant sur 2022 (parue le 21 juin), on remarque… un recul de l’utilisation du vélo sur le Pont Bessières (la part modale du vélo, toujours par beau temps un jour d’été, passe de 6 à 5%) et une stagnation sur le Pont Chauderon. D’autres indicateurs apparaissent ou disparaissent, au bon vouloir de la Municipalité : l’absence de points de repère comparable aux dernières années soulève par ailleurs les plus grands doutes quant à la progression continue du vélo.
Des chicaneries, pas de résultat
Malgré des mesures à tout-va, l’introduction du 30 km/h, des chicaneries massives à l’encontre des automobilistes, les suppressions de places de parc, la création d’autoroutes à vélos et les conséquences funestes que l’on connaît sur les petits commerces et les restaurants, un élément ressort : après avoir augmenté brièvement durant la crise pandémique, la part modale du vélo s’est à nouveau tassée.
Pas de thématisation des chiffres par communiqué de presse, cette fois. Pas de grands appels aux médias. Il ne reste que 6 ans pour atteindre cette part modale de 15% et pour mettre un terme aux émissions de CO2 dans le domaine de la mobilité. A l’évidence, Lausanne n’y arrivera pas.
Comme nous le savions, les objectifs étaient irréalistes et les moyens d’y parvenir absurdes. Mais les élections sont passées – la Ville trouvera bien une manière de vendre son bilan à l’approche des prochaines élections.
Yohan Ziehli, vice-président de l’UDC Vaud, est collaborateur scientifique auprès des parlementaires de son parti au niveau suisse.
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