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Je suis chrétien et anarchiste de droite, j’ai un Dieu, mais pas de maître. Journaliste, à la tête du magazine Le Peuple, je m’exprime sur cette newsletter à titre personnel, avec ma casquette de philosophe et de passionné de littérature. Vous allez peut-être tomber de votre tabouret, si vous venez ici pour la première fois, mais je respecterai vos désaccords, car j’aime avant tout le débat. J’aime aussi la bonne humeur, la bière, la viande rouge et le squat à la barre fixe, mais sous la parallèle.

Entre cœurs blessés

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Chers amis, chers camarades,

Cela fait trois semaines que je n’ai pas donné de nouvelles. Ou disons que si vous en avez eues, c’était par les différents collègues qui ont parlé de moi dans leurs articles. Podcasts, magazine catho, radio ou témoignage (assez douloureux) dans Blick … J’ai parfois eu l’impression de devenir une bête de foire. Je ne me plains pas, cela me permet de mieux faire connaître mon travail. Surtout, j’espère que ça aide des gens qui – comme moi – doivent composer avec une sensibilité à fleur de peau.

Il y en a un qui, depuis des décennies, n’a jamais hésité à livrer ses doutes, ses errances et ses douleurs : c’est Renaud. Oui je sais, maintenant qu’il chante à la manière d’un ours des Carpates qui vient de boire trente litres de whisky et fumer la production annuelle de Philip Morris, c’est tendance de se foutre de lui, de le traiter d’épave et d’ironiser sur le Ricard gagnant. Pourtant, comme beaucoup de gens qui se retrouvent ou non dans ses combats – le plus magistral enfonçage de portes ouvertes restant sa dénonciation de la corrida – je continue de l’aimer, le père Renaud. L’album de reprises qu’il vient de sortir, Dans mes cordes, dans lequel des violons couvrent un chant devenu laborieux voire apocalyptique, tourne en boucle chez moi depuis quelques jours. Évidemment, j’ignore à quel point un ordinateur a dû retoucher ses parties vocales, mais ce que je sais, c’est qu’il reste un être humain derrière le micro. Dans un monde où tant de gens trichent avec leurs émotions, le reste m’est parfaitement égal.

Renaud a dit merde au Bon Dieu et aux curés, et je suis catho. Il a chanté sa détestation de l’autorité, et j’ai bossé à la police. Il a dit sa haine de la bourgeoisie, et il gagne plus que n’importe lequel d’entre nous. Eh quoi ? N’est-il pas surtout ce bonhomme qui a su mettre des mots sur nos grisailles. N’est-il pas une image de cette France que nous voyons disparaître sous nos yeux ?

Il date mais reste plus beau clip de l’histoire, à mes yeux.

Je ne suis pas critique musical et je crois que je n’ai pas la plume pour parler avec autorité de ce que je ne sais pas produire moi-même. Je laisse ça à d’autres, plus subtils que moi. Je ne sais faire qu’une chose et c’est mettre ma peau sur la table. Je crois que c’est ce qui me fait aimer Renaud. Dans Son Bleu, Oscar ou dans La teigne, il a su chanter mieux que quiconque les gens modestes et les cabossés. Je l’ai déjà dit mais ce n’est pas grave : c’est à eux que va mon cœur, et le sien aussi. La politique, le pognon, les contradictions… Combien ces notions me semblent aujourd’hui secondaires.

Il y a quelque chose de très étrange, quand on avance dans l’âge. C’est de constater que les recommandations que l’on nous faisait quand on était gosses étaient peut-être les seules qui comptent vraiment dans la vie. « Sois gentil », par exemple : un peu ridicule, non ? Eh bien non, on devrait simplement se foutre du qu’en-dira-t-on et oser être gentils. Parce qu’on ne sait jamais ce que le bonhomme en face de nous traverse.

Que Dieu nous garde,
Raphaël

Illustration principale: photo de profil de l’artiste sur Facebook

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