Il y a chez les islamistes une interprétation malhonnête et obsessionnelle de la loi de 1905 qui posait les bases de la laïcité en France. Ils oublient volontairement que cette loi n’était pas destinée à accueillir à bras ouverts le catholicisme dans l’école publique. Pourquoi y accueillerait-on aujourd’hui des voiles prônés par les islamistes, dont l’essor politico-religieux ne date pas de 1905 mais plutôt des années 1930 comme celui des autres fascismes ?
Dans la Genève laïque, le bras du législateur a tremblé devant l’interdiction du voile à l’école, si bien que les fillettes voilées (comme celle qui a été filmée tout récemment dans un jeu de la RTS) ne sont plus une exception. Hélas pour elles, rien ne les protège de cette injonction envahissante et sexiste. Vaud n’a pas de loi sur la laïcité, mais nous pourrions tout à fait imaginer que dans l’école vaudoise (de l’enfantine au gymnase) soit posée une interdiction des voiles dans toute leur pseudo-diversité. Le Réseau laïque romand n’a certes pas dit son dernier mot sur cette question qu’il serait intéressant de poser à la population vaudoise et/ou d’autres cantons…
Hormis les fillettes ainsi vêtues par leurs parents pour les préparer à leur rôle pudique dans la société, il y a dans les écoles suisses des adolescentes voilées ignorant peut-être ce que ces accoutrements représentent pour les Frères islamistes et autres salafistes, qui en ont fait – contre l’islam lui-même – le porte-drapeau d’une forme figée, vindicative et paniquée de cette religion, en particulier dans le contexte européen depuis fort longtemps sécularisé. Elles suivent l’air du temps, qui souffle pour elles de deux côtés : une religiosité ensablée au VIIe siècle d’une part, et d’autre part la mode occidentale avec, de plus en plus souvent, une porosité commerciale entre les deux. Un double dé-pouvoirement des filles, si j’ose en rajouter sur un néologisme.
Ces phénomènes témoignent de ce que les islamistes ont gagné sur les cœurs et les esprits, en particulier chez les jeunes femmes issues de l’islam (pas la majorité, heureusement, disons une minorité appelée à croître), mais aussi chez quantité d’autres acteurs sociaux dont une grande partie de la gauche autrefois laïque, voire athée.
Il serait vain d’en appeler à un regain du christianisme pour contrebalancer l’idéologie islamiste, d’abord parce qu’un certain dynamisme évangélique ne fait qu’attiser le feu politico-religieux, ensuite parce que le catholicisme a bien d’autres chats à fouetter en ce moment pour desserrer les liens entre son système hiérarchique et la propagation silencieuse d’abus sur des enfants soumis à ce pouvoir.
Le seul moyen pacifique, républicain et démocratique reste la loi qu’une société se donne pour faire de l’école un lieu d’apprentissage où tous les élèves – les filles comme les garçons, faut-il le rappeler, et toutes les filles – sont provisoirement soulagés de leurs propres visions religieuses et de celles d’autrui. Ceci pour offrir autant aux élèves qu’aux enseignants une sérénité propice à la transmission des savoirs et un réel échange par-delà les séparatismes identitaires et les rôles prédéterminés.
On y reviendra.
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