Selon son étymologie, euthanasie signifie bonne mort. C’est donc un substantif, un fait. Peut-on garantir que cette mort soit bonne ?
Le suicide assisté et l’aide à mourir sont des actions, organisées par autrui.
Il n’est pas anodin que dans certains milieux on soit passé d’une appellation à une autre.
Selon mon expérience professionnelle et mon vécu privé, je distingue trois étapes qui conduisent à la mort. De même que la venue sur terre consiste en des étapes distinctes – la fécondation, la grossesse, l’accouchement – ainsi la mort passe aussi par des étapes distinctes: la mourance, l’agonie, le trépas.
La naissance permet l’arrivée d’un corps vivant, la mort rend ce corps à la terre.
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La mourance est un concept encore peu développé. Ce processus est décrit en profondeur sur le site de la Résidence Bellerive sise en Suisse, dans le Canton de Neuchâtel. (1)
« Si la mort désigne un état, la mourance décrit en fin de vie un processus qui est le reflet de celui de la naissance. Pour accompagner la mourance, nous considérons à la Résidence Bellerive qu’il est nécessaire de favoriser le bilan de vie et de traiter les manques et les regrets associés aux pertes passées et à venir. Pratiquer l’art du deuil – ainsi appelé parce qu’il s’agit d’un exercice de transformation – est l’occasion pour nous d’apporter une utile contribution»
Une psychothérapeute, Lydia Mûller, relate les différentes étapes de la mourance dans son livre : «La fin de vie, une aventure» (2). Dans les 480 pages de son ouvrage, elle présente un « Véritable guide pour la traversée de la «mourance», il la re-éclaire en établissant un parallèle précis avec la naissance. Cet étonnant point de vue, novateur et fascinant, donne sens à ce qui paraît souvent si absurde et permet de comprendre les enjeux fondamentaux de cette phase si cruciale de la vie.»
Lydia Mûller présente aussi l’essentiel de son travail dans un entretien en vidéo (3).
«L’agonie est la phase terminale de la vie, où l’organisme lutte pour survivre et où la mort approche de manière inévitable. Le mot « agonie » vient du grec « agônia », qui signifie « lutte » ou « angoisse ». En médecine, l’agonie se caractérise par une défaillance progressive des fonctions vitales (Google)
L’étymologie du mot trépas indique pleinement l’acte ultime : passer au-delà.
Ce processus de fin de vie n’appartient pas qu’aux entités humaines mais à tout être vivant. Les humains peuvent-ils avoir la prétention de le modifier ?
Tout au plus peuvent-ils influencer certaines phases du processus, avec des produits chimiques tels ceux qui provoquent le «suicide assisté», d’autres avec leur présence compatissante dans «l’accompagnement des mourants» qui se fait sur une certaine durée avec des gestes adéquats aux moments opportuns.
Des films documentaires ont été tournés dans différents lieux et expliquent les moyens développés pour accompagner des personnes en fin de vie. Par exemple : «La vie, jusqu’au bout» (4)
Des articles permettent à des soignants de témoigner : « La vie reste de la vie jusqu’au bout » (5) Questions à une infirmière : «Quelles formes peuvent aujourd’hui revêtir les soins palliatifs ?
Comme le rappelle l’Organisation mondiale de la santé, les soins palliatifs « doivent être dispensés dans le cadre de services de santé intégrés et centrés sur la personne », mais ils peuvent tout autant être organisés à l’hôpital qu’au sein d’un EMS ou à domicile si la situation le permet. Leur objectif est centré sur la qualité de vie des personnes souffrant d’une pathologie à la fois chronique, évolutive et sans possibilité de guérison complète. Ils comprennent toutes les mesures de soins et de soutien permettant de prévenir ou soulager les souffrances, qu’elles soient physiques, psychiques, spirituelles ou familiales. Les soins palliatifs ont aussi pour vocation d’aider les personnes concernées – et leurs proches – à anticiper les questions liées à la fin de vie. Bien sûr, ces démarches peuvent être complexes, mais elles peuvent aussi apporter un confort et une sérénité précieuse, même dans les cas les plus sombres.»
L’approche collective en est-elle la clé ?
J’en suis convaincue. Les soins palliatifs se sont éloignés de la vision paternaliste de la médecine centrée, il y a trente ans encore, sur le savoir du médecin qui, tôt ou tard, devait s’avouer vaincu face à une maladie incurable. Aujourd’hui, c’est la difficulté du moment qui est mise au centre de la table et l’expertise est collective. Elle inclut la personne concernée, ses proches et le personnel soignant impliqué (médecin, infirmier ou infirmière, physiothérapeute, ergothérapeute, assistant ou assistante sociale, etc.). L’objectif est à la fois d’apporter des solutions adaptées, mais également d’anticiper ce qui peut l’être, tout en restant souple face à l’incertitude propre à ces situations par essence complexes et évolutives.
De son côté, une femme médecin, cancérologue et pédiatre à la retraite s’exprime, riche de son expérience sur un sujet si vaste :
« Suicide assisté : un médecin témoigne de son vécu auprès des mourants – Dr. Nicole Delépine » (6)
Elle a aussi publié un livre qui dénote de l’envergure de sujet : « Du cancer à la vie » (Ed Marco Pietteur) avec des témoignages de patients qui s’en sont sortis malgré des métastases »
Elle pose aussi des questions qui interpellent puissamment : « Pourquoi la société n’aide pas les gens faibles à vivre ? » Elle soulève là un enjeu de taille : l’aspect économique majeur.
Il faut tenir compte aussi de ce qu’on exigera avec la nouvelle loi des soignants qui font le geste de l’injection mortelle et qui seraient condamnés pour refus de respecter la loi s’ils s’y opposaient, de même que la famille qui «entraverait la loi».
A quoi s’ajoutent la pression sociale, des pressions extérieures, des pressions de la société : «Tu n’es plus qu’un rebut, tu nous coûtes cher». S’ajoutent aussi des pressions familiales.
En tant que médecin, vous n’avez plus votre clause de médecin, ce qui est gravissime.
La Dresse Delépine soulève aussi que ce sujet entre dans le code de la santé.
Encore un thème qui laisse perplexe …
Les lois proposées apportent en outre de fortes contradictions. Jusqu’à présent, si quelqu’un voulait se jeter d’un pont, il s’agissait de non assistance à personne en danger. Avecla nouvelle loi : Délit d’entrave !
Le côté juridique reste ainsi à creuser quand on inverse les paradigmes.
Il n’y a plus d’éthique.
Une autre profonde bascule est présentée par un médecin de façon percutante dans une vidéo : «Euthanasie et trafic d’organes. Vaudrons-nous bientôt plus cher morts que vivants ?» (7)
Voici encore une bascule magistrale au niveau politique, développée dans une vidéo : «Euthanasie, prémices d’un scandale d’Etat» (8)
« Un totalitarisme a pris la médecine en otage ». Alors que certains se félicitent que « l’euthanasie permettrait d’économiser 1,4 milliards d’€ par an » dixit le journal Le Point, est-ce un monde humain celui où la vie ne vaut que par sa quantification pécuniaire ? Au vu des amendements rejetés, comme la clause de liberté de conscience des soignants et l’interdiction d’appliquer l’euthanasie ou le suicide assisté aux personnes déficientes intellectuelles, l’appropriation administrative par l’Etat de la fin de vie efface le caractère sacré de la vie humaine…
Si la période de fin de vie ne permet plus d’activités extraverties, elle donne un large espace pour une présence à l’introversion, tant pour les patients que pour leur entourage et le personnel soignant.
Espace qui permet de profondes prises de conscience et le développement d’une sagesse que l’existence actuelle passablement active et matérialiste ne permet pas ou trop peu.
En voici un témoignage poignant : «Le dernier souffle a encore un visage» (9)
Je crois que le dernier souffle d’un homme ne doit pas se perdre dans la solitude. Il demande un visage. Non celui d’un technicien. Non celui d’un parlementaire. Mais celui d’un proche, d’un vivant, d’un aimant. »
1) https://www.bellerive.ch/mes-soins/la-mourance
2) https://lydiamuller.ch/ressources/publications/la-fin-de-vie-une-aventure
3) https://www.youtube.com/watch?v=BHtTe2fYAqs&t=147s
4) https://www.weo.fr/video/la-vie-jusquau-bout–1682304662/
5) https://pulsations.hug.ch/article/la-vie-reste-de-la-vie-jusquau-bout#gsc.tab=0
6) https://www.youtube.com/watch?v=q1zLT4HZmsg
8) https://www.youtube.com/watch?v=lRPxVagb-3c
9) https://lepeuple.ch/le-dernier-souffle-a-encore-un-visage/
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